Item 320 à l'EDN : Myélome multiple des os

Fiche de révision pour l'EDN

Rappel de physiologie : les plasmocytes proviennent de la différenciation des lymphocytes B. Ils ont pour fonction la synthèse d'immunoglobulines (anticorps). Ces dernières sont caractérisées par leurs chaînes lourdes et leurs chaînes légères.

Pic monoclonal

La prolifération tumorale d'un clone plasmocytaire entraîne la sécrétion d'une immunoglobuline particulière, ce qui se traduit par un pic monoclonal à l'électrophorèse des protéines sériques (EPPS).

MGUS

Définition d'une gammapathie monoclonale de signification indéterminée (MGUS) : 

  • sécrétion d'Ig monoclonale sanguine < 30 g/L
  • plasmocytose médullaire < 10%
  • aucun symptôme CRAB

Les symptômes / critères CRAB

  • C : hypercalcémie > 2,75 mmol/L
  • R : insuffisance rénale (créatininémie > 177 µmol/L ou clairance < 40 mL/min)
  • A : anémie (hémoglobine < 10 g/dL)
  • B : plusieurs lésions osseuses ostéolytiques (bone diseases en anglais) sur des radios / scanner / TEP-TDM

Les radiographies mettent classiquement en évidence des images de lacunes osseuses à l' "emporte-pièce", sans réaction périphérique. Cet aspect typique est retrouvé au niveau de la voûte du crâne (aspect "lunaire").

Myélome multiple des os (maladie de Kahler)

Définition : hémopathie maligne lymphoïde caractérisée par une prolifération tumorale de plasmocytes au niveau de la moelle osseuse sécrétant des immunoglobulines monoclonales.

On parle de myélome multiple indolent (ou asymptomatique) si :

  • sécrétion d'immunoglobuline monoclonale sanguine > 30 g/L
  • et/ou plasmocytose médullaire > 10%
  • absence de critères CRAB

Attention, en présence d'au moins un des 3 critères suivants, il faut désormais considérer la maladie comme symptomatique :

  • plasmocytose médullaire > 60%
  • ratio de chaines légères > 100
  • présence de plus d'une lésion focale à l'IRM ou au TEP-TDM

Autrement, un myélome multiple des os symptomatique correspond à :

  • sécrétion d'immunoglobulines monoclonales sanguines et/ou urinaires
  • plasmocytose médullaire > 10%
  • au moins un critère CRAB

Maladie de Waldernström

Définition : prolifération de lymphoplasmocytes monoclonaux au sein de la moelle osseuse. Cela correspond à un lymphome non-hodgkinien B indolents (de bas grade de malignité).

Présentation clinique : syndrome tumoral (adénopathies, hépatosplénomégalie), cytopénies (centrales ou périphériques), syndrome d'hyperviscosité, manifestations dysimmunitaires (neuropathie démyélinisante via l'activité anti-MAG, cytopénies auto-immunes, cryoglobulinémie).

Biologie :

  • lymphoplasmocytes > 10% au myélogramme et/ou biopsie ostéomédullaire (BOM)
  •  électrophorèse des protéines du sérum : gammapathie monoclonale de type IgM
  • imagerie (échographie, TDM TAP) : syndrome tumoral ganglionnaire profond, hépatomégalie, splénomégalie

Risque évolutif : syndrome d'hyperviscosité (lié au pic d'IgM), complications auto-immunes, complications liées aux cytopénies si envahissement médullaire, anomalies de l'hémostase (syndrome de Willebrand acquis), transformation en lymphome B de haut-grade, amylose AL.

Epidémiologie

MGUS : très fréquent

  • 3% des gens après 50 ans
  • 5 à 10% après 70 ans
  • Risque évolutif : 1%/an d'évolution vers un myélome multiple, une maladie de Waldenstrom, un autre lymphome de bas grade ou une amylose AL.

Myélome :

  • 1% des cancers
  • 10% des hémopathies malignes
  • 4000 à 5000 nouveaux cas par an en France
  • Atteint l'adulte avec un âge moyen au diagnostic proche de 70 ans
  • Facteurs de risque : pesticides

Mode d'entrée dans la maladie

  • découverte fortuite chez un patient asymptomatique (myélome indolent)
  • anémie
  • douleurs osseuses (squelette axial, rythme inflammatoire), fractures pathologiques (tassements vertébraux, fracture des os long)
  • insuffisance rénale aigüe
  • hypercalcémie

Parfois certaines complications peuvent être révélatrices :

  • infections : germes encapsulés (pneumocoque, méningocoque, haemophilus)
  • compression médullaire, syndrome de la queue de cheval
  • plasmocytome superficiel et/ou profond (tumeur au dépend des structures osseuses ou viscérale)
  • maladies de dépôts d'immunoglobulines (amylose AL)

Examens complémentaires

Electrophorèse des protéines du sérum (EPS) : pic à bande étroite correspondant à la présence de l'immunoglobuline monoclonale. Celle-ci migre le plus souvent dans la zone des gammaglobulines (moins fréquemment en zone bêta).
En cas de myélome à chaîne légère (20% des cas) : absence de pic monoclonal mais présence d'une hypogammaglobulinémie

Immunofixation : confirme la présence de l'Ig monoclonale et permet de typer son isotype : chaîne lourde (G, A, M, D, E) ou chaîne légère (kappa ou lambda).
En cas de myélome : surtout IgG, fréquent IgM, rarement Ig D / E / M
Surtout chaînes légères kappa (2/3 des cas), possible lambda (1/3)

Dosage des chaînes légères libres sériques : indispensable pour le myélome à chaînes légères (intérêt diagnostic et pour le suivi) et pour le bilan du myélome indolent (critère théorique de traitement si ratio > 100).

Protéinurie de Bence-Jones : présence anormale de chaînes légères monotypiques dans les urines. L'analyse du sédiment urinaire doit être systématique lors du diagnostic d'une gammapathie monoclonale.
En cas de protéinurie de type glomérulaire (albuminurie > 1 g/24h) au cours du myélome : suspecter une néphropathie gloméluraire associée (amylose AL, maladie de Randall ou autre maladie de dépôts d'Ig).

Complications rénales

Insuffisance rénale : présence > 20% lors du diagnostic de myélome (critère CRAB). C'est une urgence thérapeutique.

Principale cause : néphropathie de surcharge à cylindres myélomateux, liée à la précipitation tubulaire des chaînes légères avec l'uromoduline (protéine de Tamm-Horsfall). Cela induit une nécrose tubulaire aigüe.

Autres causes fréquentes :

  • hypercalcémie
  • iatrogène : AINS, produit de contraste iodé
  • globe urinaire (avec les opioïdes par exemple), déshydratation, etc.

Plus rarement : insuffisance rénale liée à une maladie de dépôt d'immunoglobulines (amylose AL, maladie de Randall)

Si albuminurie : penser à une néphropathie glomérulaire associée.

Identifier l'urgence de l'hypercalcémie

Hypercalcémie : complication fréquence du myélome (entrée dans la maladie pour 15 à 30% des patients) mais peut-être une véritable urgence médicale

Physiopathologie : lyse osseuse par les plasmocytomes tumoraux

Symptômes (parfois asymptomatique) : asthénie, soif intense, syndrome polyuropolydipsique, douleur abdominale, constipation, confusion

Biologique : rechercher calcium ionisé, calcémie corrigée avec albuminémie, insuffisance rénale associée

Electrocardiogramme (ECG) : trouble de conduction (BAV, segment ST court, QT court), trouble du rythme (risque de fibrillation ventriculaire [FV]).

Prise en charge : hospitalisation, hyperhydratation au sérum physiologique, biphosphonates IV (attention si insuffisance rénale), traitement étiologique en urgence (corticothérapie).

Surveillance : poids et diurèse

Si hypercalcémie majeure avec insuffisance rénale aigüe et/ou signe ECG : soins intensifs avec scope +/- épuration extrarénale.